La pollution de l’air : un sujet au cœur des débats publics actuels
La circulation automobile constitue l’une des causes majeures de la pollution de l’air dans les zones urbaines, les véhicules émettant non seulement des polluants gazeux (NO, NO2) mais aussi des particules fines et ultrafines (dont la taille est inférieure à 100 nanomètres). Ces particules extrêmement nocives pénètrent très profondément dans le système respiratoire et sont à l’origine chaque année, de près de 48 000 décès prématurés, soit 9 % de la mortalité nationale.
Les pouvoirs publics se sont saisis du problème. Les élus du Grand Paris ont par exemple voté le 12 novembre dernier, la mise en place d’une Zone à Faible Émission (ZFE) interdisant la circulation des véhicules les plus polluants (Crit’Air 5) dans 79 communes situées à l’intérieur de l’A86 à compter de juillet 2019.
L’ESTACA travaille depuis plusieurs années avec ses partenaires institutionnels, académiques et industriels des secteurs automobile, ferroviaire et aéronautique sur ces sujets. Les travaux et projets menés par les enseignants-chercheurs de l’équipe Qualité de l’Air et Dépollution (QUAD) d’ESTACA’LAB seront mis à l’honneur à l’occasion du Workshop ‘Air Quality In Transportation Systems’, organisé sur son campus de Paris Saclay.
Un workshop dédié à l’impact des systèmes de transports sur la qualité de l’air
L’objectif de cet événement dédié à la recherche scientifique est de rassembler des scientifiques, des industriels, des utilisateurs et les institutions chargées de la mise en place des normes, autour de problématiques contemporaines sur la pollution générée par nos différents modes de transports. Parmi les thématiques abordées :
- Le contrôle de la qualité de l’air en périphérie des aéroports de Paris (Projet Survol, Airparif) ;
- Les caractéristiques et l’analyse des polluants issus des transports terrestres infiltrant l’habitacle du véhicule (Projet CAPTIHV, Estaca-Airparif) ;
- La gestion de la qualité de l’air dans l’industrie automobile (Maurice Bellamou, Denso) ;
- L’impact des émissions polluantes des navires, des locomotives et des autoroutes sur la qualité de l’air du bassin de Los Angeles (Pr. Constantinos Sioutas, University of South California) ;
- Le projet « Antismog » pour la réduction de la pollution liée aux embouteillages (Newecotechno)
Une recherche en pointe à l’ESTACA sur la qualité de l’air à l’intérieur des habitacles automobiles : l’exemple du projet CAPTIHV
Soutenue par l’Agence De l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie (ADEME), l’ESTACA développe actuellement le projet CAPTIHV (Caractérisation et Analyse des Polluants issus du Transport automobile et de leur Infiltration dans les Habitacles Véhicules). Labellisé par le pôle de compétitivité ID4CAR, ce projet a pour objectif de mieux comprendre les mécanismes qui influencent la dispersion des polluants gazeux et particulaires, de leur émission à l’échappement à leur infiltration dans les habitacles. Des mesures de concentrations de polluants à l’intérieur et à l’extérieur de ces habitacles sont réalisées grâce à des études expérimentales en soufflerie et à des mesures embarquées réalisées en région parisienne.
Les mesures embarquées ont permis d’étudier l’influence de paramètres internes au véhicule (type et mode de ventilation, ouverture des vitres, âge et type de véhicule) mais également externes (trafic, type d’infrastructure routière et météorologie) sur la Qualité de l’Air Habitacle (QAH). Les résultats sur un parcours urbain ont permis d’observer que la concentration de NOx et le nombre de particules mesurées dans l’habitacle pouvaient respectivement atteindre 50 et 24 fois ceux mesurés à l’extérieur.
Le projet CAPTIHV va permettre d’émettre des recommandations quant au comportement à adopter en terme d’aération et mode de ventilation selon les conditions de roulage
De nouveaux équipements pour donner une nouvelle dimension aux travaux de recherche de l’ESTACA
Récemment, les travaux de recherche des enseignants-chercheurs de l’École ont pris une nouvelle dimension avec l’acquisition d’équipements de pointe pour la caractérisation de la qualité de l’air intérieur et extérieur. Pour Amine Mehel, enseignant-chercheur au sein de l’équipe QUAD : « ces équipements vont permettre de caractériser les polluants gazeux et particulaires, d’abord à la source et puis après leur dispersion. L’objectif est de pouvoir contrôler leurs dynamiques pour améliorer la qualité de l‘air intérieur ».
Concernant les projets de qualification des sources de pollution particulaires, Benoit Sagot, enseignant-chercheur au sein de la même équipe, explique : « nous avons choisi un instrument qui est utilisé dans le domaine ferroviaire pour quantifier les émissions de particules de freinage, le ELPI+. Nous nous sommes aussi équipés de matériels portables comme les Fidas Frog, qui sont des instruments conçus pour la surveillance des aérosols en air intérieur et en hygiène industrielle. Côté laboratoire, nous avons récemment réceptionné une nouvelle soufflerie et un dispositif de type PIV, qui associé à un générateur de fumée, permet de caractériser des champs de vitesse dans la veine d’essai ».
Frédéric Murzyn, enseignant-chercheur sur le site de Laval, précise que « ces dispositifs permettent de caractériser les écoulements dans le sillage de différents types de véhicules. En complément, des capteurs de pression ont été acquis pour permettre de mieux comprendre le mécanisme d’infiltration des polluants dans l’habitacle véhicule. Enfin, les équipements portables (Dust-Trak et P-Trak) vont nous permettre de réaliser des mesures embarquées de qualité de l’air dans un habitacle en situation de roulage. ».
Les études utilisant ces équipements sont complétées par l’utilisation des simulations numériques multiphasiques. Selon Georges Fokoua : « l’utilisation de la CFD permet de comprendre finement la dynamique des particules fines et ultrafines et de proposer des solutions pour contrôler leur dispersion. Des thèses CIFRE sont en cours pour comprendre la dispersion des particules de freinage dans les stations souterraines ou des particules de suies dans le sillage des véhicules émetteurs et dans les habitacles ».